

Espagne: Pedro Sánchez dit qu'il ne savait "rien" d'une affaire de corruption dans son parti et demande pardon
Ebranlé par la mise en cause du numéro trois de son Parti socialiste dans une affaire de corruption, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a assuré jeudi qu'il ne savait "absolument rien" de ce scandale et demandé "pardon" aux Espagnols, excluant des législatives anticipées.
"Aux citoyens (...), aux militants et aux sympathisants du Parti socialiste ouvrier espagnol, je veux demander pardon parce que, jusqu'à ce matin, j'étais convaincu de l'intégrité de Santo Cerdán", a déclaré lors d'une conférence de presse M. Sánchez en référence à l'ex-secrétaire de l'organisation du PSOE, qui avait annoncé sa démission moins d'une heure avant.
"Nous n'aurions pas dû lui faire confiance", a poursuivi le Premier ministre, par ailleurs secrétaire général du PSOE, à propos de celui qui était considéré comme l'homme des dossiers délicats au sein du parti. C'est lui, par exemple, qui avait négocié en 2023 le ralliement au gouvernement du parti indépendantiste catalan Junts de Carles Puigdemont.
L'air grave et clairement affecté par la crise, M. Sánchez a indiqué avoir personnellement demandé à M. Cerdán de démissionner de toutes ses fonctions, y compris son siège de député, semblant confirmer sa culpabilité alors même qu'il n'a pas encore été mis en examen.
La démission du numéro trois du PSOE a été la conséquence rapide et inéluctable de la publication d'un rapport de police révélant "l'existence d'indices concordants concernant la possible participation" de Santos Cerdán à une affaire de pots de vin.
D'après ce rapport policier, résumé par un juge du Tribunal suprême, l'ancien responsable du PSOE est soupçonné d'être "complice" d'un ex-ministre socialiste, José Luis Ábalos, autrefois homme de confiance de M. Sánchez, et de son assitant Koldo García Izaguirre dans "l'attribution indue d'un contrat public" pour laquelle il aurait touché une commission.
Il s'agit là d'un nouveau volet dans une enquête tentaculaire ouverte depuis plus d'un an autour de soupçons de corruption lors d'achat d'équipements de santé pendant la pandémie de Covid-19 et visant notamment M. Ábalos, ancien ministre des Transports de M. Sánchez.
Accueilli au Parlement jeudi matin aux cris de "Démission, démission!" par les députés de l'opposition de droite, M. Cerdán a annoncé dans l'après-midi sa démission de tout ses postes au parti comme de son mandat de député.
- "Complot mafieux" -
"Afin de défendre le Parti socialiste auquel ce pays doit tant et afin de défendre ce gouvernement, j'ai décidé de présenter ma démission de tous mes postes", a-t-il écrit dans un communiqué, assurant toutefois "n'avoir jamais rien commis d'illégal".
Sa position était difficilement tenable depuis la publication jeudi dans la presse d'extraits d'enregistrements de conversations qu'il aurait eues avec M. Ábalos et l'assitant de celui-ci, Koldo García, dans lesquelles les trois hommes semblent évoquer le paiement de commissions occultes par des sociétés en échange de marchés publics.
La chute brutale de M. Cerdán survient alors que les enquêtes judiciaires visant des proches du Premier ministre se multiplient depuis des mois et que la liste des dossiers qui l'éclaboussent ne cessent de s'allonger.
Outre M. Ábalos, sa femme Begoña Gómez est visée par une enquête pour corruption et trafic d'influence, son frère David doit bientôt être jugé pour trafic d'influence et le procureur général de l'Etat, le plus haut magistrat du parquet, nommé sur proposition du gouvernement de gauche, est visé par un procès pour des fuites d'information.
"J'imagine que les doutes se sont dissipés, si quelqu'un en avait, autour du fait que nous pensons être en face d'un complot mafieux derrière le parti du gouvernement et le gouvernement", a réagi jeudi, avant la démission de M. Cerdán, Alberto Nuñez Feijóo, dirigeant du premier parti d'opposition, le Parti populaire (droite).
Dimanche, à l'appel du PP, des dizaines de milliers de personnes s'étaient rassemblées dans le centre de Madrid pour conspuer M. Sánchez, l'accusant de corruption et réclamant sa démission.
M. Sánchez, qui a toujours défendu la probité de son épouse et de ses ministres, accuse la droite et l'extrême droite d'être à l'origine de ce qu'il a décrit comme des "campagnes de diffamation" destinées, selon lui, à déstabiliser son gouvernement.
Mais les révélations concernant M. Cerdán et sa démission affaiblissent cet argument et sa position.
P.Bouvier--PP