

La Poste fixée sur son sort en appel sur le respect du "devoir de vigilance"
La Poste, première entreprise condamnée pour manquement à son devoir de vigilance, loi qui impose aux grandes entreprises de prévenir risques environnementaux et atteinte aux droits humains de leurs activités, attend mardi la décision en appel.
Si d'autres multinationales sont dans le viseur des ONG, telles TotalEnergies, BNP Paribas, Casino, La Poste est à ce jour la seule à avoir été condamnée sur le fondement de cette loi de 2017.
Un plan de vigilance "pas conforme aux exigences légales en raison de son imprécision", qui devra être complété "par une cartographie des risques" : voilà ce qu'a reproché en 2023 le tribunal judiciaire de Paris à La Poste, après avoir passé au crible ses dizaines de pages.
L'entreprise a été condamnée à réviser ce texte, rendu obligatoire par la loi, qui contraint les grandes sociétés (plus de 5.000 salariés en France ou plus de 10.000 dans le monde) à publier un plan de vigilance sur les risques humains et environnementaux de leurs activités, y compris au sein de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants.
Aucune astreinte financière n'a été imposée à La Poste.
Ce jugement "porte sur d'anciens plans de vigilance", notamment celui de 2020, "qui ne reflètent pas les avancées en 2022 et 2023", s'est défendue l'entreprise publique sur son site.
Selon la loi, un plan de vigilance doit comporter plusieurs mesures, dont une cartographie des risques permettant d'identifier de potentielles atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement, des procédures d'évaluation régulière ainsi que des mécanismes d'alerte et de suivi.
La Poste, qui emploie quelque 230.000 personnes dont 23% à l'étranger selon son dernier document d'enregistrement universel, avait été assignée en 2021 par le syndicat Sud PTT.
L'appel de la multinationale suspend de ce fait la condamnation.
- Directive européenne -
La rédaction de cette loi avait été motivée par le drame du Rana Plaza, du nom de l'immeuble abritant un atelier de confection qui s'était effondré en 2013 au Bangladesh, faisant 1.138 morts.
Cette tragédie avait mis en lumière les conditions de travail souvent déplorables des ouvriers du textile du pays qui, souvent à travers plusieurs degrés de sous-traitance, fabriquent les vêtements vendus par les plus grandes multinationales de mode.
En promulguant cette loi, la France a été suivie par les Pays-Bas en 2019, puis l'Allemagne en 2021.
Poussé par la société civile, le Parlement européen avait donné son feu vert en avril 2024, après de longues et âpres négociations, à une directive imposant un "devoir de vigilance" aux entreprises, portant notamment sur le travail des enfants, le travail forcé, les dommages environnementaux, la pollution, etc.
Cette directive n'a pas le même périmètre que la loi française et a été récemment contestée par des responsables politiques - dont le chancelier allemand Friedrich Merz et le président français Emmanuel Macron - qui y voient un énième "fardeau administratif" qui pèserait sur la compétitivité des entreprises "au mépris des réalités opérationnelles".
B.Fabre--PP