

"Conclave" sur les retraites: fumée blanche ou pas ?
Accord ou positions irréconciliables: impulsé par François Bayrou, le "conclave" des partenaires sociaux sur les retraites doit s'achever mardi par une dernière réunion, entre âge de départ qui ne bougerait pas et contreparties sur la pénibilité.
Point final, vraiment ? Le Premier ministre s'est dit lundi prêt à accorder "quelques jours de plus", au-delà de la date butoir de mardi, aux cinq participants encore présents -- CFDT, CFTC, CFE-CGC côté syndical, Medef et CPME côté patronal.
Et il a lancé une nouvelle proposition, accorder une "prime" aux salariés seniors. Une "partie de sa retraite, en plus de son salaire", pourrait être versée au salarié "qui aurait atteint ses droits à la retraite" et déciderait "de rester au travail", a-t-il indiqué à la presse.
Initiative qui a manifestement pris de court les syndicats. "On a découvert ça dans la presse", a commenté lundi après-midi l'un des participants aux discussions, qui n'avait reçu aucun détail sur la nouvelle idée du Premier ministre.
Pour rappel, la concertation, débutée le 27 février, devait à l'origine rendre ses conclusions le 28 mai. Et le processus a déjà connu son lot de portes qui claquent, avec les départs de FO dès la première réunion puis de la CGT et de l'U2P (organe des artisans côté patronal) mi-mars.
Le défi du "conclave" est de taille: trouver un terrain d'entente pour rendre moins impopulaire la réforme des retraites Borne de 2023, portant progressivement l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.
Et rééquilibrer le système des retraites qui, sans contre-mesure, plongerait dans un déficit chiffré à 6,6 milliards d'euros en 2030, selon la projection du Conseil d'orientation des retraites (COR).
- "50/50" -
C'est aussi un instant de vérité pour François Bayrou, qui avait lancé ce nouveau format de discussions après un compromis noué avec les socialistes pour éviter une censure du gouvernement.
Le Premier ministre s'était alors engagé à présenter un éventuel accord des partenaires sociaux devant le Parlement. Même si les choses ne sont plus aussi claires selon des propos rapportés dans La Tribune Dimanche: "Tout dépendra si l'accord comporte ou non des dispositions législatives".
Avant d'en arriver là, il faudrait que le "conclave" accouche d'un relevé de conclusions commun. C'est du "50/50", ont estimé en écho Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, et Patrick Martin, président du Medef, principal représentant patronal, interrogés par La Tribune Dimanche sur les chances d'aboutir à un texte commun.
L'équation pourrait toutefois se compliquer à entendre Pascale Coton, négociatrice de la CFTC, jeudi dernier à l'issue de l'avant-dernière entrevue: "Si on est cinq à signer, c'est un vrai engagement; si nous ne sommes que trois à signer (les syndicats), ça ne serait déjà pas du tout la même chose".
Même si ça ne faisait pas grand mystère depuis le début, le Medef a entériné depuis mardi dernier qu'il ne bougerait pas sur l'âge de départ à 64 ans. Ce qui ne signifie pas forcément une fin de non-recevoir pour les syndicats.
- "Effort financier" -
Tout dépendra de ce que le patronat lâchera en termes de carrières des femmes, de pénibilité, ou d'augmentation de cotisation.
Sur l'usure professionnelle, la CFDT veut obtenir que le compte professionnel de prévention (C2P) soit revu et corrigé pour permettre d'intégrer les critères de manipulation de charges lourdes, les postures pénibles ou les vibrations mécaniques. Pour que les salariés concernés puissent partir un peu plus tôt en retraite.
"Il n'y aura pas d'accord avec la CFDT si le patronat n'avance pas plus" sur cette question, a mis en garde Marylise Léon dans la Tribune Dimanche.
Et il reste encore un angle mort majeur: quid du financement du système des retraites ? "Medef et CPME ne veulent pas participer à l'effort financier", grince Pascale Coton pour la CFTC: les organisations patronales refusent en effet d'augmenter les cotisations salariales ou patronales.
Pour les sources de financement, les syndicats ne rejettent pas l'idée que les retraités puissent être mis à contribution. Les scénarios envisagés tournent autour d'une sous-indexation des retraites sur l'inflation - comme c'est déjà le cas pour les retraites complémentaires Agirc-Arrco - ou d'une augmentation des taux de CSG susceptible d'épargner les retraités modestes.
A.Dupuis--PP